Da’ech menace directement le Maghreb (et le Maroc)

Trois annonces d’allégeance et/ou de soutien à Da’ech (organisation de l’Etat islamique) ont été diffusées d’une manière concomitante le week-end dernier. Elles proviennent d’Algérie, de Tunisie et du Maroc.  

Da’ech menace directement le Maghreb (et le Maroc)

Le 16 septembre 2014 à 16h39

Modifié le 11 avril 2021 à 2h36

Trois annonces d’allégeance et/ou de soutien à Da’ech (organisation de l’Etat islamique) ont été diffusées d’une manière concomitante le week-end dernier. Elles proviennent d’Algérie, de Tunisie et du Maroc.  

La première est venue d’Algérie où un groupe implanté dans l’est du pays, a annoncé faire allégeance à Abou Bakr Baghdadi et rompre ses liens avec Aqmi, Al Qaida du Maghreb islamique. Le groupe algérien s’appelle kataeb al wassat (les brigades du milieu). Peu de temps après, un groupe tunisien, la brigade Oqba (katibat oqba ibn Nafia) diffusait un message affirmant son soutien et sa solidarité avec l’organisation dite de l’Etat islamique. Les jihadistes du Maghreb central basculent progressivement d'Aqmi vers Da'ech.

Ce groupe du maquis tunisien, est en réalité composé de jihadistes tunisiens et algériens. Selon les déclarations d’un jihadiste arrêté, diffusées par la télévision tunisienne et visionnées par Médias 24, les chefs du groupe sont tous algériens. Ce groupe a revendiqué à plusieurs reprises des attaques mortelles et des actes cruels sur des soldats tunisiens dont plusieurs ont été égorgés, en 2013 et 2014.

Le troisième message est un message audio, il provenant d’un certain Mohamed Al-Fartakh, présenté comme un détenu marocain. Il y affirme son allégeance à Baghadi. Nous n’avons pas pu authentifier de source sûre l’existence de ce personnage. Son message a été diffusé par différentes sources proches de l’Etat dit islamique, ainsi que par le Marocain Abderrazak Ajaha, qui est un relais très actif de cette mouvance au Maroc et qui est très prolifique sur les réseaux sociaux.

Médias 24 vérifie autant que possible toutes ses informations auprès de sources primaires et cite ses sources, tout en fournissant à ses lecteurs les liens pour qu’ils puissent se faire leur propre opinion. Mais en matière de terrorisme, nous évitons de diffuser les liens, pour ne pas relayer la propagande de ces mouvances.

Pourquoi il faut prendre cette annonce au sérieux

Le web jiahdiste évoque souvent le Maghreb comme une cible et un possible foyer de l’implantation du “califat“.

En fait, le pays le plus fragile est la Libye, il est en pleine guerre civile. La Tunisie, encore en transition et trop proche de la Libye, court également des risques. L’Algérie a toujours été cible, surtout que son immense Sahara est difficilement contrôlable et que des foyers persistent depuis la guerre civile. Le Maroc est pour l’instant le pays stable et semble bien à l’abri.

Mais l’insécurité jihadiste se diffuse par capillarité. C’est un peu comme un effet domino.

Une stratégie inédite

La stratégie jihadiste menée par l’organisation Da'ech est différente de celle d’Al Qaida. Pour prendre une métaphore économique, la  première est une multinationale très centralisée, la seconde est un franchiseur.

Alors que l’organisation de Ben Laden a attaqué d’abord l’ennemi lointain (l’Amérique par exemple), celle de Baghdadi se concentre sur l’ennemi dit proche.

Alors que la première s’est organisée d’une manière décentralisée (pour éviter d’être décapitée), celle de Baghdadi a prôné la centralisation.

La stratégie de Baghdadi est en fait exposée en détail dans un manuel qui date de 2008. Il est signé d’un certain Abu Bakr Naji, qui ne correspond à aucun jihadiste connu. Il s’agit probablement du pseudo d’un sympathisant ou activiste. Le manuel en question est en fait une série d’articles publiés dans un forum jihadiste en 2008 et qui ont été assemblés sous forme de manuel par un centre d’études arabe.

Dès le titre, ce manuel donne froid dans le dos : “idarat attawahouch“, traduit en anglais par “management of savagery“. Il est centré autour du concept de l’ensauvagement ou de l’état d’anarchie (ou encore siba) dans lequel il faut précipiter les pays cibles pour prendre ensuite le pouvoir.

Ce manuel qui explique en détail la stratégie actuelle de Da’ech, base toute l’action autour de deux axes: la centralisation et l’anarchie provoquée.

Il décrit le processus en trois étapes :

- l’étape 1: la montée en puissance, guerre d’usure contre la société et les institutions, prédication, recrutement ; chacune de ces composantes est décrite en détail, avec une planification.

- l’étape 2 : celle du chaos, de l’anarchie (Irak, Syrie, Libye, Yémen). Les institutions vont tomber une à une, l’insécurité doit régner, l’Etat est affaibli, et la population  ne cherchera plus qu’un peu de nourriture et une protection, que lui fournira opportunément Da’ech dans des zones prévues pour (territoires contrôlés). Pendant cette période, l’un des axes de la communication consiste à promouvoir et mettre en scène la cruauté. Cette dernière est conceptualisée.

- l’étape 3 est celle de la consolidation, car dans le chaos, c’est Da’ech qui doit tirer les marrons du feu et prendre le contrôle total des territoires et de leur administration.

Tout est expliqué, la guerre, les attentats, la cruauté, la communication, la prédication, les double et triple langages, le recrutement…

Après la consolidation, l’organisation doit lancer les mêmes conquêtes dans le monde dit musulman puis faire la guerre au monde entier, progressivement, par la même méthode, celle de la destruction des Etats, de la confessionnalisation et ethnicisation des conflits. On comprend mieux les attentats aveugles et meurtriers contre des mosquées ou des mausolées,… C’est pour semer la haine dans des pays où la mentalité tribale et l’esprit de vengeance sont omni présents.

La carte ci-dessus est un exemple parmi d’autres des cartes qui circulent sur le web jihadiste et qui traduit les ambitions de conquête de ces mouvances.

Leur stratégie est basée sur la division et l’affaiblissement de l’Etat pour instaurer la siba. Seul un Etat fort peut contrecarrer cette stratégie. Faut-il le rappeler? Un Etat fort n’est ni un Etat policier ni un Etat rentier. C’est un Etat démocratique où la justice sociale est respectée et où la citoyenneté et la méritocratie sont promues.

L'affaiblissement de l'Etat, c'est aussi la police religieuse improvisée comme à Tanger, la propagation de la haine et le takfir. Le meilleur moyen de lutter contre Da'ech, c'est zéro tolérance vis-à-vis de tout cela.

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