Héritage: plutôt que de polémiquer, il faut accepter le débat

La recommandation du CNDH relative à l'égalité successorale soulève une grosse polémique. Pourtant, le CNDH est dans son rôle.

Héritage: plutôt que de polémiquer, il faut accepter le débat

Le 22 octobre 2015 à 15h50

Modifié 11 avril 2021 à 2h37

La recommandation du CNDH relative à l'égalité successorale soulève une grosse polémique. Pourtant, le CNDH est dans son rôle.

La proposition du CNDH qui a soulevé de grosses vagues concerne en fait une réforme de la Moudawana pour une égalité totale entre les hommes et les femmes. Et dès qu’on dit égalité en termes de code de la famille, on dit égalité dans la contraction du mariage, dans sa dissolution, dans la tutelle des enfants et... dans la succession.

Comme à l’accoutumée, la prise de position du CNDH n’est ni polémique, ni idéologique.

Elle part de faits, de données objectives.

Le constat des inégalités d’abord. La Constitution et les conventions internationales ensuite. La démonstration coulait de source. Les recommandations aussi.

La riposte, dès le lendemain, n’était ni loyale ni digne d’une démocratie. Le CNDH a été attaqué, vilipendé, stigmatisé, incendié et calomnié. Le CNDH est pourtant une instance constitutionnelle qui a le droit de prendre la parole et qui l’a fait ici sans provocation et en y mettant les formes.

La condition de la femme et le code de la famille déchaînent toujours les passions. Ils sont le bastion qui échappe aux lois contemporaines et à l’autonomie du droit.

La recommandation du CNDH a fait forte impression par contre, dans le sens positif du terme, dans les milieux libéraux du monde arabe, comme nous l’avons constaté à travers différents échanges.

Voici quelques points de réflexion sur la question de l'héritage, une sorte d'invitation au débat:

1- En démocratie, on devrait avoir le droit de débattre de tout. Même de l’immuable.

2- Si le droit successoral était immuable, il serait identique d’un pays arabo-musulman à l’autre. Or, ce n’est pas le cas.

3- Les opposants à la recommandation du CNDH refusent le débat. Leurs arguments consistent à attaquer le CNDH et les personnes qui le dirigent, à leur prêter des intentions cachées, à les traiter d’ennemis du Maroc et de la nation… Dans le meilleur des cas, ils sont traités d’ignorants.

4- En fait, ce n’est pas l’égalité successorale qui est refusée. C’est pire que cela. C’est le principe même d’en débattre. "Ici, Monsieur Yazami, vous êtes sur notre territoire, et vous êtes un intrus."

5- Ce refus total du débat signifie qu’il y a une absence ou une pauvreté de l’argumentaire, voire un manque d’assurance.

6- Il y a deux voies pour ouvrir le débat. Soit se situer à l’intérieur des textes, soit se situer à l’extérieur. Le CNDH s’est situé à l’extérieur et c’est normal, c’est un conseil de droits humains, donc il s’appuie sur les lois.

7- Si l’on veut se situer à l’intérieur des textes, le débat est également intéressant. Nous publions la vision de l’un des nombreux théologiens qui estiment que l’égalité successorale est possible, à travers le legs testamentaire. Il y en a beaucoup d’autres. Il faut les écouter. On ne peut en aucun cas les suspecter de porter atteinte à la religion ou à la foi des musulmans.

8- Pour décréter la clôture de l’Ijtihad, de l’exégèse, de l’interprétation et pour contrer les velléités d’émergence d’une autonomie du droit, les oulémas d’il y a dix ou onze siècles avaient annoncé que les sources de la législation devaient se limiter au Coran, aux hadiths, à l’analogie (qiyas) et à l’unanimité (ijmaâ). Mais attention, seuls les oulémas étaient à même d’utiliser ces sources. Ce qui s’appelle fermer la porte au débat.

9- L’Islam est une grande religion qui a été avant-gardiste en matière de droits humains. Elle a prôné, en des temps reculés, des valeurs d’une élévation inconnue jusque là. Mais elle a été instrumentalisée par des tribus, des hommes, une vision patriarcale, des contextes politiques et économiques différents d’aujourd’hui. Ce qui perdure comme excès puise ses origines dans trois postulats inacceptables de nos jours: que l’homme est supérieur à la femme; que le Musulman est supérieur au non-Musulman; que l’homme libre est supérieur à l’esclave. Si vous acceptez ces postulats, vous devez accepter les excès qui en découlent. Si vous les refusez, vous devez être conséquent avec vous-même.

10- La recommandation du CNDH, au-delà des réactions émotionnelles qu’elle suscite, vient interpeller chacun d'entre nous. Nous portons tous, dans l’aire musulmane, à la fois le poids de la modernité et celui de la tradition, mais à des degrés divers en fonction de la personne.

La recommandation du CNDH met à nu la contradiction qu’il y a en chacun de nous. Affrontons les choses, regardons-les avec les yeux de la raison et non avec les émotions, faisons preuve d’autocritique et débattons.

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