Daech: l'Islam est le prétexte, pas la cause

L’actualité est dominée par la guerre entre Daech et les pays européens. Les interventions en Syrie vont augmenter.

Daech: l'Islam est le prétexte, pas la cause

Le 23 novembre 2015 à 12h53

Modifié 11 avril 2021 à 2h37

L’actualité est dominée par la guerre entre Daech et les pays européens. Les interventions en Syrie vont augmenter.

Le porte-avions français Charles De Gaulle est prêt au combat et les Rafales seront plus nombreux à frapper les positions ennemies.

Une victoire militaire contre Daech est impossible. Pire: l’histoire récente le démontre, plus l’intervention militaire occidentale sera longue et directe et plus les dégâts seront nombreux.

Daech est né du démantèlement du Baas en Irak et de l’intervention de G. W. Bush. Les frappes de l’Otan et de la France en Libye ont fourni un important stock d’armes aux groupes armés, du Mali à l’Egypte, en passant par la Tunisie et la Libye.

Première conclusion: une défaite militaire ne suffira pas à anéantir Daech. Ce week-end, il a suffi d’une alerte terroriste portant sur deux éventuels kamikazes pour que la ville de Bruxelles soit entièrement paralysée. La guerre est asymétrique et Daech n’est pas uniquement un mouvement armé, il y a des racines et des fondements politiques, économiques et sociaux.

En second lieu: la place et la référence à l’Islam dans la littérature de Daech et dans la motivation des tueurs, à Paris, en Egypte ou en Syrie.

L’être humain n’est pas programmé pour tuer son prochain, de sang-froid et avec préméditation. C’est un acte exceptionnel. Pour le déclencher, le chaînon indispensable est la fatwa. C’est une fatwa qui l’autorise. Pire encore, qui le commande. Tuer est une obligation divine, disent les chioukh du jihad. Cette fatwa est toujours appuyée par des versets du coran et des hadiths, extraits de leur contexte.

La vraie question est alors la suivante: l’Islam est-il la cause ou le prétexte? Puis: comment agir pour empêcher cette instrumentalisation?

Les réponses sont claires:

-l’Islam est le prétexte, pas la cause. Dans l’Islam, il y a un corpus violent et il y a un corpus pacifique. Comme dans les autres religions révélées. Des trois religions du Livre, c’est certainement la moins violente. A titre d’exemple, citons l’avis de Jacqueline Chabbi, chercheuse française, arabisante, historienne, auteur de recherches scientifiques très intéressantes sur l’islam, la société de l’époque, sur le Coran… Jacqueline Chabbi n’est absolument pas complaisante à l’égard de l’Islam, elle est dans une posture de critique scientifique.

Dans une déclaration à Arte (vidéo ci-dessous), Jacqueline Chabbi explique qu’à l’aube de l’Islam, "on évitait absolument de tuer des gens. La société des origines n’était pas tueuse. Les conquêtes recherchaient le ralliement et la négociation plutôt que le combat. A l’époque, le respect des alliances passe avant tout, c’est une rupture d’alliance que de tuer quelqu’un qui ne vous a rien fait".

Autre argument: la majorité écrasante des musulmans puise dans le corpus pacifique et délaisse le corpus violent. Il faut donc se demander pourquoi ces musulmans-là préfèrent le corpus violent et quelle est notre responsabilité, à nous tous, pour contrecarrer cette évolution. Ceci nous renvoie vers le processus de radicalisation.

Une réforme indispensable: le champ religieux

L’Islam, on l’a dit, est un prétexte. Il faut néanmoins agir pour contrecarrer l’activation du corpus violent à des fins idéologiques. La réforme du champ religieux est un passage obligé, comme le soulignait l’appel de 67 laïcs musulmans publié début 2015. Même au Maroc, où de grands pas ont été effectués, il reste du chemin à faire. En nettoyant les manuels scolaires de toute référence au corpus violent, par exemple. En transmettant, dans le domaine de l’instruction religieuse, des messages conformes aux idéaux contemporains d’égalité humaine et aux valeurs universelles.

En gros, le premier travail à faire doit l’être au niveau du champ religieux. Des pays, des médias sont devenus des vecteurs et des producteurs de littérature violente, une idéologie –le wahabism, s’y est spécialisée.

Seconde réforme, la culture et l’enseignement. Un désastre qui est tel qu’aucune réforme ne donnera de résultats sur le court terme. Tout ce que l’on pourra faire, c’est limiter les dégâts. Si on s’y prend maintenant, des résultats concrets pourront être obtenus dans 10 ou 15 ans. Au lieu d’apprendre les valeurs universelles et une culture des droits de l’homme, l’école véhicule deux affirmations d’un autre âge: l’homme est supérieur à la femme; le musulman est supérieur aux non-musulmans.

Par ailleurs, les populations arabes subissent les pires violences et cela dure depuis des décennies. Les violences ont été coloniales, elles ont été occidentales (décomposition de l’Irak sous l’effet de l’intervention américaine, alors qu’il n’y avait ni armes de destruction massive, ni complicité dans le 11-septembre).

Violences également de la part de leurs propres dirigeants. Un Kaddafi a fait régresser la Libye. Un Benali a supprimé toute vie politique, inhibé toute initiative qui sort du carcan officiel même en culture ou en économie, banni toute dissidence.

Pour la Syrie, ce furent à la fois des violences endogènes et des violences exogènes. Le soulèvement syrien, au début pacifique et certainement légitime, a été télécommandé par des officines occidentales, les preuves abondent. Ce qui ne signifie pas que Bachar n’est pas un dictateur, devenu un boucher.

Et n’oublions pas la question palestinienne, qui a aggravé le sentiment d’injustice et d’humiliation.

Les pays arabes n’ont pas su construire des démocraties. Ils n’ont pas su apprendre le vivre-ensemble. Les pays sont mal gérés dans leur écrasante majorité. Les inégalités, l’indifférence, la mauvaise qualité de l’enseignement, l’absence d’espoir, le chômage des jeunes, tout cela dirige les désespérés vers des tunnels qui les coupent de la société. C’est là que commence la radicalisation.

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