Les gardiens de voitures, cibles d'une campagne de boycott sur les réseaux sociaux

Une campagne de boycott des gardiens de voitures est lancée depuis la mi-mai sur les réseaux sociaux. Elle concerne plusieurs villes, et principalement Casablanca et Rabat. Des citoyens dénoncent l’emprise exercée sur l’espace public. Les communes, elles, réagissent favorablement à ce mouvement.

Les gardiens de voitures, cibles d'une campagne de boycott sur les réseaux sociaux

Le 24 mai 2021 à 19h43

Modifié 25 mai 2021 à 9h24

Une campagne de boycott des gardiens de voitures est lancée depuis la mi-mai sur les réseaux sociaux. Elle concerne plusieurs villes, et principalement Casablanca et Rabat. Des citoyens dénoncent l’emprise exercée sur l’espace public. Les communes, elles, réagissent favorablement à ce mouvement.

Sous le hashtag #Boycott moul gilet, ou encore ضد مول جيلي أصفر#, cette campagne, qui a démarré il y a quelques jours sur les réseaux sociaux, a pris une certaine ampleur. Le premier groupe Facebook créé dans ce sens, à savoir « Boycott moul gilet », compte à présent plus de 88.000 membres, ce qui reflète le degré de colère.

De nombreuses réclamations ont été déposées sur les portails Chikaya.ma et CasablancaCity.ma. Certains médias ont également parlé d'une vague d'arrestations de faux gardiens, à l'issue de ce mouvement, une information que nous n'avons pas pu vérifier.

Plusieurs récits et mésaventures sont partagés sur ledit groupe, dont les membres dénoncent l'anarchie des gardiens et les pratiques illégales devenues courantes. Il s’agit notamment des :

- prix très élevés pratiqués par certains gardiens, par exemple à Dar Bouazza où le tarif de stationnement avoisine les 20 DH, ou à la corniche de Aïn Diab (10 DH ou plus) ;

- l’agressivité de certains gardiens, lorsque le citoyen refuse de payer la somme exigée ;

- devoir payer à chaque arrêt;

- la prolifération des faux gardiens.

D’autres pratiques illégales existent également, notamment la sous-location, à des prix élevés, d'espaces de stationnement par les sociétés ayant remporté les appels d'offres d'exploitation lancés par les communes, ou encore l'interdiction aux automobilistes de prendre un ticket d’horodateur…

"Une prérogative des communes"

Pour connaître les conditions d'exploitation de ces espaces, Médias 24 a contacté un avocat au barreau de Casablanca, ainsi que des responsables aux communes de Rabat et Casablanca, principales villes concernées par cette campagne de boycott.

Notre avocat nous confie ainsi que "la gestion du stationnement est l’une des prérogatives des communes, selon la loi 78-00 portant charte communale et l’article 83 de la loi organique 113-14 relative aux communes".

Cet article précise ce qui suit: "la commune crée et gère les services et équipements publics nécessaires à l’offre des services de proximité dans les domaines suivants (….) : la circulation, le roulage, la signalisation des voies publiques et le stationnement des véhicules (…)".

Pour faire face à l’anarchie sur la voie publique, "le contrôle doit donc se faire de manière régulière. A Casablanca par exemple, les gardiens portent des badges, qui peuvent être facilement reproduits à Derb Ghalef." Il est donc devenu très difficile de distinguer entre les gardiens autorisés par la commune et les faux gardiens.

"A mon avis, cette campagne ne servira à rien. Ils finiront par revenir. Il faut trouver une solution radicale, comme par exemple, l'automatisation à 100% de ce service". Certes, cette campagne montre le degré de mécontentement des citoyens, "mais il faut prendre en compte l'aspect pauvreté. Si ces gardiens sont chassés, ils se retrouveront sans aucune source de revenus".

Affermage et gestion déléguée

Pour sa part, Lahcen Elomrani, premier adjoint au maire de la ville de Rabat, nous explique la manière dont les communes confient l'exploitation des espaces de stationnement. "Il s'agit d'une prérogative propre à la commune, selon l'article 83 de la loi 113-14. C'est un service public", nous confie-t-il confirmant les propos de l'avocat joint par Médias 24.

"Il y a deux manières de confier l'exploitation de ces espaces, dont la première est l'affermage. La commune lance ainsi des appels d'offres pour louer ces espaces. Le marché peut être confié à des entités morales comme à des personnes physiques. C'est l'offre la mieux disante qui est retenue".

"Toutefois, dans des communes, certaines sociétés ou personnes qui remportent les appels d'offres procèdent à la sous-location de ces espaces, chose qui n'est pas réglementaire. Par exemple, une société confie l'exploitation d'une avenue à un gardien, en contrepartie de 1.000 DH par jour. Si ce dernier rapporte plus, il garde le reste. Egalement, dans des petites communes, où les montants de location sont dérisoires, allant de 30.000 à 150.000 DH par an par exemple, certaines sociétés adjudicataires sous-traitent le marché".

"D'un point de vue réglementaire, ces pratiques n'ont aucun fondement, d'autant plus que l'affermage ne peut se faire sans appel d'offres. Il ne peut pas y avoir une entente directe dans l'affermage".

"La seconde manière est un modèle de gestion plus performant, dans le cadre de la gestion déléguée, et se rapproche d'un partenariat public-privé. Il s'agit ainsi de la mise en place d'une société dédiée. A Rabat, nous avons Rabat Parking, où la commune est majoritaire, avec la CDG qui est partenaire. Cette société s'occupe de la gestion des espaces de stationnement, via des horodateurs, pour le compte de la commune".

M. Elomrani dénonce ainsi la prolifération "de gens qui n'ont aucune casquette, aucune autorisation, et aucune compétence, et qui exploitent la voie publique. A Rabat, il n'y a même pas un seul gardien autorisé, mais si l'on fait un tour dans la ville, on en trouve plein, puisque Rabat Parking ne travaille que dans la zone bleue. Celle-ci se trouve dans une partie de l'Agdal, Hassan et Hay Ryad. Ces personnes en font un moyen de survie et ne payent rien à la commune".

"Il faut mettre fin au harcèlement pratiqué par les gardiens de voitures"

Quant au président de l'arrondissement d'Ain Chock, et vice-président du Conseil de la ville de Casablanca, il nous fait savoir qu'outre l'affermage et la gestion déléguée, "des autorisations d'exploitation de places de stationnement dans des petites ruelles sont délivrées aux personnes à besoins spécifiques, en contrepartie d'une redevance. Ces personnes font leurs demandes auprès du président de la commune. Après consultation du président de l'arrondissement en question, le vice-président en charge de la mobilité donne, ou pas, son accord. Lorsqu'il s'agit de renouvellement de cette autorisation, il suffit de la signature du président de l'arrondissement".

Ainsi, "toute personne ne disposant pas d'une autorisation officielle de la commune, n'a aucun droit d'exiger de l'argent des automobilistes".

Notre source souligne aussi que "des contrôles sont effectués par la police administrative. Des sanctions sont applicables en cas de non-respect des clauses du cahier des charges de l'exploitation de ces espaces".

Même son de cloche auprès d'un membre de la Commission des services publics, du patrimoine et des prestations de la commune de Casablanca, chargée, entre autres, de la création et la gestion des services et des équipements publics ainsi que des règlements relatifs à la gestion des services publics communaux.

Notre interlocuteur nous explique qu’après changement de la politique de la ville en 2003, un plan stratégique de gestion de stationnement a été mis en place, qui s'articule autour de trois axes: "les parkings", gérés par la société de développement local Casa Baia, "les horodateurs", mis en place dans les grandes artères, et "les autorisations d’exploitation" délivrées aux personnes morales ou physiques, après approbation, pour ces derniers, du président de l'arrondissement.

"Ces gardiens doivent ainsi payer une contrepartie à la commune, et ne doivent exploiter que les espaces qui leur sont dédiés. Les citoyens font l’objet de harcèlement quotidien sur la voie publique. Il faut donc revoir ce point, pour y mettre fin", conclut-il.

Rappelons qu'à Casablanca, le tarif de stationnement et de gardiennage est fixé par arrêté fiscal municipal: 3 DH pour les voitures, 5 DH pour les camions, et 2 DH pour les bicycles, motorisés ou non. Ces tarifs sont valables pour n'importe quelle période, y compris l'été, et peuvent être augmentés la nuit.

Ces tarifs sont placardés sur des affiches pour information du public, mais ne sont pas respectés par les gardiens. Les citoyens sont ainsi appelés à signaler tout dépassement à la commune, via le portail chikaya.ma ou casablancacity.ma.

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