Nouveau modèle de développement : M’Fadel El Halaissi appelle à un choc de l’emploi 

L’économiste et banquier M’Fadel El Halaissi plaide pour plus d’audace dans les réformes structurelles en bannissant les zones grises ou les réglementation floues. Il appelle aussi à un choc de l’emploi comme véritable moyen d’atteindre la croissance espéré. Verbatim.

Nouveau modèle de développement : M’Fadel El Halaissi appelle à un choc de l’emploi 

Le 8 juin 2021 à 22h51

Modifié 9 juin 2021 à 13h35

L’économiste et banquier M’Fadel El Halaissi plaide pour plus d’audace dans les réformes structurelles en bannissant les zones grises ou les réglementation floues. Il appelle aussi à un choc de l’emploi comme véritable moyen d’atteindre la croissance espéré. Verbatim.

« Je suis resté sur ma soif. Le Maroc a rendez-vous avec l’histoire et on ne doit pas le rater. Je pense que ce document manquait d’audace », lance M’Fadel El Halaissi à l’adresse des membres de la commission spéciale pour le modèle de développement (CSMD) lors du débat organisé par Médias24, jeudi 3 juin 2021.

« Vous prônez l’audace dans ce document, mais il en manquait pour toucher quelques réformes structurelles fondamentales pour notre société et notre pays. Je comprends car c’est un document consensuel qui a essayé d’arrondir les ongles, partager les positions de chacun pour arriver à ces conclusions ».

« Je crois qu’une société est menée par des élites qui doivent faire preuve d’audace. Je crois à l’autorité éclairée. On impose une vue quand on y croit. A chercher des consensus, on laisse des plumes et on rate le rendez-vous », avertit-il.

Les élites doivent prendre des initiatives audacieuses

Pour lui, l’exemple le plus parlant de ce manque d’audace est celui du tourisme. « Nous voulons développer le tourisme et le secteur des loisirs, on ne peut pas le faire si on continue à avoir une loi sur les boissons alcoolisées qui est complètement discordante ».

« Soyons clairs, on veut développer le tourisme, alors il faut réaménager certaines choses. Les zones grises, ce n’est pas bien. On ne peut pas développer le tourisme sans boite de nuit, sans licence de boissons,… on ne peut pas le faire sans des libertés individuelles ».

« Donc, soit on y va ou on n’y va pas. Ce sont des sujets qui peuvent parfois gêner certains courants. Ils peuvent même toucher notre société. Mais les élites doivent prendre les initiatives audacieuses. »

« Quand Sa Majesté a décidé de réformer la Moudawanna, c’était un acte courageux. Aujourd’hui on voit bien que la société l’a assimilée, l’a adoptée… et les choses se passent normalement ».

L’emploi est le moteur de la croissance 

Sur le volet purement économique, M’Fadel El Halaissi a longuement argumenté en faveur d’une croissance dont le moteur est l’emploi. Il explique sa pensée par trois concepts : la croissance, le poids du FBCF dans notre PIB et les inégalités.

« Nous sommes à 3,5% de croissance, c’est trop  faible. Nous avons créé bon an mal an, 40.000 à 50.000 emplois au cours des dix dernières années. On a un marché qui produit 300.000 à 350.000 demandes d’emploi par an. Sur les 10 dernières années, nous avons créé 2 millions de chômeurs. Quand on créé des chômeurs, on réduit le marché au niveau du pouvoir d’achat».

Même avec 200.000 emplois créés par an, compte tenu du nombre de demandeurs d’emploi qui arrivent sur le marché, avoir une croissance de 6%, est un objectif qui sera difficilement atteint, à en croire l’économiste.

« Il faut aller au-delà de 200.000 et chercher un objectif beaucoup plus ambitieux qui soit en corrélation avec le niveau de notre économie », avance-t-il.

L’investissement public au service de l’emploi

Le deuxième point développé par M’Fadel El Halaissi est celui la formation brute du capital fixe  (FBCF). « La FBCF représente 30% du PIB. C’est quand même un gros effort de notre économie, mais ce que que je reproche à ce chiffre c’est qu’il intègre pas mal de choses complètement mélangées.  Il n’y a aucune étude sur la rationalisation des choix budgétaires. Qu’est-ce que je vais faire avec tel investissement? Qu’est-ce qu’il va me générer comme surplus économique, notamment en matière de création d’emplois? », explique-t-il.

« Il faut rationaliser nos choix budgétaires en fonction de nos objectifs et l’objectif qui doit être prioritaire si on veut faire de la croissance, c’est l’emploi ».

Le troisième aspect c’est celui des inégalités. « L’ économie de marché est par essence une économie inégalitaire. Le détenteur du capital cherche toujours en maximisant le profit, il comprime les salaires parmi les coûts de production. En comprimant les salaires, le pouvoir d’achat est réduit, la consommation aussi, le capital n’investit plus… C’est un cercle vicieux », analyse l’économiste.

« Quel est l’équilibre qui va nous permettre de faire en sorte que le détenteur du capital qui se rémunère en profit puisse faire en sorte que le salarié dispose d’un pouvoir d’achat dans la pérennité et dans la croissance? Le système de marché ne fait de la croissance qu’à partir du moment où la consommation est continue. Si celle-ci s’arrête, la crise s’installe, et c’est ce qu’on vit depuis quelques années », poursuit-il.

« Bien sûr, ce n’est pas au capital de réduire les inégalités, c’est à l’Etat de jouer le rôle de redistribution des revenus et l’amélioration du pouvoir d’achat ».

Pour ce dernier, l’élargissement de l’AMO est un bon exemple. « Faire en sorte que le citoyen soit pris en charge par l’État, c’est un pouvoir d’achat qui lui est donné de manière indirecte. Mais il faut que cette redistribution soit bien ciblée et destinée aux personnes nécessiteuses et qui ont besoin d’améliorer leur pouvoir d’achat afin de stimuler le marché pour maintenir un taux de croissance supérieur à 6% ».

Donc, la clé pour atteindre les 6% de croissance réside selon M’Fadel El Halaissi en une plus importante création d’emplois portée par une meilleure rationalisation des investissements de l’Etat et un meilleur soutien du pouvoir d’achat à travers la réduction des inégalités.

« Un emploi créé par l’État peut en générer 10 dans le privé », argumente-t-il.

« Je suis convaincu qu’on peut faire beaucoup plus que 200.000 emplois par an en tenant compte de l’économie sociale, par exemple », insiste-t-il.

« La priorité des priorités devrait être orientée sur comment créer suffisamment d’emplois pérennes, sédentaires qui permettent d’avoir du pouvoir d’achat et donc de la croissance ».

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