Morocco Tech, premières clés de lecture

ROUND UP. Morocco Tech, qui se veut une vision, un mouvement et une marque fédérant les acteurs de l’écosystème, est au cœur d’une polémique où s’entremêlent critiques sur la réalité de cette économie, couacs organisationnels et contexte électoral.

Morocco Tech, premières clés de lecture

Le 23 janvier 2022 à 22h19

Modifié 24 janvier 2022 à 9h44

ROUND UP. Morocco Tech, qui se veut une vision, un mouvement et une marque fédérant les acteurs de l’écosystème, est au cœur d’une polémique où s’entremêlent critiques sur la réalité de cette économie, couacs organisationnels et contexte électoral.

La plateforme Morocco Tech, lancée vendredi 14 janvier 2022 en grande pompe lors d'un événement auquel étaient associés plusieurs acteurs du monde du digital, a essuyé de vives critiques sur son contenu, en provenance d'une partie de l'écosystème avant de sombrer dans une polémique qui commence à prendre les allures d'un scandale, impliquant deux des chevilles ouvrières du projet à savoir Amine Zerrouk et Mehdi Alaoui, les président et vice-président sortants de l'APEBI. 

Dans ce round-up, Médias24 retrace ces événements qui ont ponctué la semaine, braqué les projecteurs et soulevé le couvercle sur un secteur qui évoluait jusque-là dans l’ombre. 

>> Morocco Tech, c’est quoi ? 

Le 14 janvier donc, « le Maroc lance l’initiative MoroccoTech, la marque nationale de promotion du secteur digital marocain, portée par le Ministère chargé de la Transition Numérique et de la Réforme de l’Administration, en étroite collaboration avec la Fédération des Technologies de l’Information, des Télécommunications et de l’Offshoring (APEBI) et en partenariat avec l’AMDIE, l’ADD, la CGEM, l’AUSIM et le Technopark ».  C’est ainsi que l’initiative est présentée par le communiqué officiel.  

Une journée de plus de 8 heures de débats, avec un programme où s’alternent les interventions en français et en anglais. Les organisateurs ont mis en place des diffusions avec des traductions 100% en anglais et en arabe.  

Ci-dessous, le live en version originale.

L'événement est présidé par Ghita Mezzour, Ministre déléguée, chargée de la Transition Numérique et de la Réforme de l’Administration, en présence de Younes Sekkouri, ministre de l’Inclusion Economique de la Petite Entreprise, de l’Emploi et des Compétences.

Dans la communication officielle autour de l'initiative, il est expliqué que "Morocco Tech a pour ambitions, d’une part, de positionner le Maroc comme destination numérique de choix à l’international, d’autre part, de créer une dynamique globale qui profitera à l’ensemble des écosystèmes marocains dans leur transformation numérique".

Elle est présentée comme "issue d’une démarche partenariale public- privé, est la déclinaison d’un mouvement mobilisateur et fédérateur des différents acteurs de l’écosystème digital marocain".

Un manifeste est publié sur le site de l'événement expliquant "ce qu'est Morocco Tech" et ce qu'il n'est pas. Sur ce dernier point, il est précisé que Morocco Tech n'est pas : "un label", "uniquement un programme de marketing / relations publiques", "un ensemble d’entreprises d’élite", "n’est pas fermé / limité aux Marocains".

>> Une ambition sans feuille de route  ?   

L'événement a suscité un débat et essuyé plusieurs critiques, s'interrogeant sur la pertinence de lancer une marque pour célébrer et promouvoir l’économie digitale marocaine, dépourvue de toute mesure précise et concrète ni d'un programme pour développer ce secteur. 

 

Quatre jours après l'événement, le CESE publie un rapport sur la transition digitale qui dresse des constats alarmants sur la réalité des avancées marocaines, confirmant en somme, qu'il y a encore beaucoup à faire sur ce domaine.

>> La critique se transforme en polémique

Au milieu de ce débat, le journal en ligne le1, publie le 19 janvier, un article où il explique que "le choix du nom de l’étendard national de l’économie numérique s’est fait sans s’assurer que le domaine «.ma» correspondant soit disponible". Le lendemain, un article du Desk  avance que la marque "Morocco Tech" n'a pas pu être officiellement enregistrée à l'OMPIC, fera entrer l'initiative dans la polémique.

Notre confrère le1, revient sur le sujet, dans un autre article où il explique "que le nom de domaine de la marque en question, MoroccoTech.org n’était pas la propriété du Royaume du Maroc mais de la société Media Mobility, détenue par le vice-président de l’APEBI, Mehdi Alaoui".

Ces informations sont reprises et aucune partie prenante de l'initiative ne prend la parole pour apporter des explications. Morocco Tech donne l'impression d'être lâché par tous. Surtout que les informations rapportées par nos confrères sèment le doute sur qui endosse la responsabilité de porter cette initiative dont l'identité, a été clairement, adossée à la marque marocaine Morocco Now pour promouvoir l'investissement au Maroc.

Sur le site de l'événement, il n'y aucune référence à un acteur clé porteur de cette plateforme. Tous les acteurs de l'événement sont cités dans la rubrique "Partenaires", sans aucune autre mention explicite.

Voilà ce qui est des faits et de la chronologie des événements.

Médias24 a sondé plusieurs sources, dont la ministre Ghita Mezzour, pour comprendre ce qui se passe réellement. Voici l'essentiel des explications que nous avons pu collecter à ce stade. Notons que seule la ministre et l'ex-présidente de l'APEBI, Salwa Karkri Belkeziz, ont accepté de répondre à visage découvert.

>> Un lancement en pleine course à la présidence de l'APEBI 

A l'origine, Morocco Tech est une proposition de l'APEBI, comme nous le confirment Salwa Karkri Belkeziz et une autre source qui requiert l'anonymat, sondée par Médias24. L’idée de cette marque était déjà parmi les propositions émises par l’APEBI dans le cadre d’une feuille de route pour le secteur.

"Le bureau de l’APEBI a travaillé en étroite collaboration avec l’équipe de l’ancien ministre Moulay Hafid Elalamy sur un nouveau contrat-programme, parce que la stratégie Maroc Digital 2020 était arrivée à échéance. Ce contrat-programme n’a pas pu aboutir", nous explique Salwa Karkri Belkeziz.  "Avec l’arrivée du nouveau gouvernement doté d’un ministère dédié au digital, le projet du contrat-programme a été relancé. Mais il a été décidé de lancer d’abord la marque avant le contrat-programme", poursuit-elle.

L'autre source nous confie « qu’une fois le contact établi entre le ministère et l’APEBI, il a été décidé d'un commun accord que le projet Morocco Tech soit porté par le ministère pour s’assurer de l'adhésion de tous les acteurs dans un esprit fédérateur".

La crainte était que Morocco Tech essuie le même échec que "le pacte Maroc digital" qui n'a pas vu le jour à cause des mésententes au sein de l'écosystème". Surtout que le binôme Zarrouk et Alaoui sont en fin de mandat. Une AGE est prévue début février.

Selon cette source, "le ministère a pris les devants et l'APEBI est mise au même niveau que les autres institutionnels associés à l'événement". Cela sur le plan de la communication, car sur le terrain, l'APEBI a joué le rôle de l'organisateur. La Fédération s'est chargée de coordonner l'organisation. Mais c'est Ghita Mezzour qui préside l'événement. Elle a également fait un exposé sur le sujet en conseil du gouvernement, quelques jours après.

Cela étant, est-ce finalement un projet porté par le gouvernement marocain ou par l'APEBI ? "MoroccoTech est le fruit d'une dynamique collaborative qui a fédéré les efforts de nombreux acteurs du secteur public et privé pour atteindre des objectifs communs. A l’instar des multiples partenaires qui nous soutiennent déjà, nous œuvrons pour associer davantage d’acteurs à notre mouvement. C’est en créant des synergies et en s’assurant de l’adhésion de tous que l’on pourra relever le défi de faire du Maroc une destination digitale de choix", nous répond Mme Mezzour, la ministre de la Transition Numérique et de la Réforme de l’Administration.

>> “MoroccoTech” est déposé à l'OMPIC au nom du Ministère

Sur le sujet de l'enregistrement de la marque "MoroccoTech", nos sources avancent que l'APEBI, dans le cadre de l'organisation de l'événement, a tenté de s'occuper de l'enregistrement de la marque. "Un couac est arrivé comme il peut y en avoir surtout que l'événement a été organisé en un temps record", commente-t-elle.

De la précipitation, en somme ? " Il n’y a pas eu de précipitation, mais la volonté de s’inscrire dans une dynamique énergique et efficace. Le numérique évolue très rapidement, notre objectif est donc de travailler de manière agile et évolutive, en étant à l’écoute des besoins et des évolutions de la communauté numérique marocaine, de laquelle nous recevons un feedback très précieux depuis le lancement de la marque. A l’image des process du monde digital, nous prenons en compte ce feedback pour être en perpétuelle amélioration et nous invitons d’ailleurs la communauté à continuer de nous envoyer ses idées et ses retours", répond Ghita Mezzour.

Pour la ministre, il n'y a pas de sujet. "Le nom de la marque MoroccoTech est bel et bien déposé au nom du Ministère de la Transition Numérique et de la Réforme de l’Administration auprès de l’Office Marocain de la Propriété Industrielle et Commerciale", affirme-t-elle. "En ce qui concerne le nom de domaine “moroccotech.ma”, nous n’avions pas l’intention de l’utiliser. Nous sommes en cours d’élaboration du futur site de la marque, qui sera hébergé au Maroc et aura une portée internationale et sur lequel nous communiquerons lors de son lancement", assure-t-elle.

>> L'économie numérique a besoin d'action

Au-delà la polémique autour de l'événement, tout cela a le mérite de soulever le débat sur un domaine dont les enjeux ont été, trop longtemps, relégués au second plan. Les langues se délient. Des acteurs mettent en lumière les manquements et révèlent certaines dérives. Le couvercle est soulevé.

Le fond du sujet est de savoir si la plateforme "Morocco Tech" sera le point de départ d'une vraie révolution, amenant dans son sillage des mesures concrètes ou si elle se résumera à un événement d'un jour et tombera dans les oubliettes.

"Dans le cadre de MoroccoTech, un plan d’action a été élaboré. Plusieurs écosystèmes prioritaires ont été identifiés dont notamment la fintech, l’agritech, la healthtech, l’offshoring des services IT, le govtech, l’edtech et l'e-commerce. L’Intelligence Artificielle est également une technologie transverse très puissante pour la promotion de l’ensemble des écosystèmes", promet Mme Mezzour dans ses réponses à Médias24.

"Des mesures inclusives sont aussi prévues, elles concernent notamment le renforcement de l’infrastructure, la formation des talents IT, l’élargissement du marché digital local, la multiplication des zones d’accélération numérique, le soutien à l’export ainsi que l’accompagnement des entrepreneurs et investisseurs digitaux", poursuit-elle.

Il appartient donc au ministère d’œuvrer activement pour tenir ses promesses, car les acteurs espèrent des actions plus que des ambitions et parce que le Maroc, contrairement à ce que laisse entendre le mot "célébration", a vraiment du chemin à parcourir.

Médias24 consacrera une série d'articles à l'écosystème des startups et aux nombreuses problématiques soulevées au cours de la semaine écoulée.

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