Le moins que l’on puisse dire, c’est que les trois dernières années ont été éprouvantes pour l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, n° 3 de l’industrie automobile mondiale. Remise en cause après l’éviction de Carlos Ghosn, déstabilisée par la pandémie du coronavirus puis par la crise des semi-conducteurs, l’union entre les trois partenaires a souffert de performances commerciales et financières bien en deçà des espoirs placés en elle.

Aujourd’hui, l’Alliance tente de se reconstruire autour d’une nouvelle vision, ébauchée en mai 2020, et qui prend désormais corps dans une feuille de route en bonne et due forme.

"L’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi est un modèle unique qui a fait ses preuves. Depuis vingt-deux ans, nous nous appuyons sur nos cultures et nos forces respectives pour notre réussite commune", a déclaré Jean-Dominique Sénard, président de l'Alliance. "Les trois entreprises ont défini une feuille de route commune à horizon 2030, en partageant les investissements dans les futurs projets d'électrification et de connectivité. Des investissements massifs qu'aucune des trois entreprises ne pourrait réaliser seule."

Amplifier les synergies

Le premier axe stratégique de cette nouvelle roadmap est l’amplification des synergies entre les trois constructeurs. Il faut dire que depuis la naissance de l’Alliance, il y a près de vingt ans, ses deux principaux composants n’ont jamais vraiment réussi à instaurer une coopération suffisamment forte sur le plan industriel.

À titre d’exemple, les Nissan Leaf et Renault Zoe, un temps pionnières de la voiture électrique, ne partagent pratiquement aucun élément commun. C’en est désormais fini de cette dispersion d’efforts : l’objectif est de densifier l’usage de plateformes communes, intéressant 80% des modèles en 2026, contre 60% actuellement, sur un ensemble de 90 modèles attendus chez les trois marques.

Le changement de braquet est déjà en bonne voie, puisque les deux nouveaux modèles 100% électriques des deux constructeurs, la Megane E-Tech électrique et la Nissan Ariya, sont bâties sur une même base technique. Quant à Mitsubishi, qui n’a que récemment rejoint l’Alliance, il suivra bientôt le mouvement avec l’introduction de deux nouveaux modèles reprenant des plateformes existantes.

Accélérer l’électrification

Le renforcement des synergies se reflète également dans le second pilier de la feuille de route 2030 : l’accélération de l’électrification. Signe des temps, le thermique n’est tout simplement pas mentionné dans les futurs plans. Dans les cinq prochaines années, l’Alliance va investir 23 milliards d'euros sur l’électrification, afin de proposer 35 nouveaux modèles 100% électriques à l’horizon 2030.

La quasi-totalité de ces modèles sera basée sur 5 plateformes communes EV, couvrant différents segments de marché. Il s’agit de :

•   La plateforme low-cost CMF-AEV, déjà utilisée par la Dacia Spring (bientôt commercialisée au Maroc).

•   La plateforme KEI-EV, destinée comme con nom l’indique aux "Kei Cars", ces véhicules ultra-compacts spécifiques au marché japonais.

•   La plate-forme LCV-EV, destinée aux véhicules utilitaires légers et déjà utilisée par le nouveau Renault Kangoo.

•   La plateforme CMF-EV, plateforme électrique polyvalente qui équipe déjà les Nissan Ariya et Renault Megane E-Tech électrique, et qui sera déployée sur 15 modèles inédits d’ici 2030.

•   La plateforme CMF- BEV, nouvelle base électrique compacte qui sera lancée en 2024 et qui équipera différents modèles Renault, Alpine et Nissan, dont les futures Renault R5 et Renault R4, ainsi que la prochaine génération de la Nissan Micra.

Cette marche au pas de charge vers l’électrification passe aussi par une stratégie collective en matière de batteries, notamment à travers la sélection de fournisseurs communs pour les trois constructeurs. L’Alliance travaille déjà avec des partenaires en vue de réduire le coût des batteries de 50% en 2026, et de 65% en 2028 ; l'objectif étant de disposer d’une capacité de production totale de batteries de 220 GWh à travers le monde d’ici 2030.

Parier sur la voiture connectée

Le dernier axe stratégique de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi est le pari sur l’automobile connectée. En la matière, le groupe dispose déjà d’une fondation solide, en l’occurrence le système de conduite semi-autonome ProPilot développé par Nissan et équipant déjà nombre de ses modèles. Les trois constructeurs de l'Alliance prévoient que, d'ici 2026, 45 de leurs modèles seront équipés de systèmes de conduite autonome, atteignant un parc total de 10 millions de véhicules en circulation.